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« Ecrire n'est pas décrire. Peindre n'est pas dépeindre. La vraisemblance n'est que trompe-l'oeil. » Georges Braque

L'univers muséal dans lequel je fus plongée durant mon enfance (Feurs, France, 1979) m’a naturellement poussée à m'intéresser à l'Histoire de l'Art, tandis que le médium photographique s'est imposé à moi dans le choix de mes études supérieures (La Cambre, 1998-2003). Ces deux domaines allaient in fine s’accorder pour former la base de ma démarche de photographe.

C'est en 2002, à l'occasion de l'exposition Jan Van Eyck, les primitifs flamands et le Sud au Musée Groeninge à Bruges que me vient l'envie d'allier ces deux passions. Les portraits si tangibles de ces œuvres datant du XVe siècle m'évoquent soudainement les visages observés dans la rue depuis mon arrivée en Belgique (1998). Lors de mes études, je découvre, dans l'utilisation de la chambre technique, une qualité plastique apparentée à la peinture à l'huile et une manière de photographier rappelant l'attitude du peintre face à son chevalet. La série des Portraits bruxellois (2003) concrétise ce mariage de l'esthétique des primitifs à la technique photographique dans une volonté de continuité historique.

De tout temps, les artistes ont puisé leur inspiration dans cet héritage commun qu'est notre culture, travaillant autour d'archétypes. De la même manière, les sujets récurrents dans l'Histoire de l'Art traversent toute ma recherche photographique. Au cœur de cette démarche, la visite de musées ainsi que la consultation de catalogues et d’ouvrages artistiques me permettent d'enrichir mes connaissances pour m'inspirer dans le choix de mes sujets et me guider durant la prise de vue. Ainsi Vénus (2005), nu féminin allongé, est un hommage à tous les nus de l'Art, mais également une vision contemporaine d'un corps bien différent des représentations actuelles que nous donnent à voir la publicité et les magazines.

Dans Paysage hollandais avec barque (2007) et Paysage bruxellois (2010), où le souhait est de questionner notre rapport moderne à la nature, les scènes combinant la beauté d'un site à la présence humaine engendrent des images-tableaux faisant fonction seules et non plus en série. Il n’existe par ailleurs pas de mise en scène du réel dans mes paysages, et pourtant, on peut y voir ce même héritage, cette esthétique picturale qui permet à chacun de s'y plonger.

Avec le portrait L'homme (2007), dans une pose pouvant rappeler le Christ aux mains liées de l'Ecce homo, la corrélation à la peinture se fait peu à peu plus discrète, plus intime. A partir de là, l'évidence du référent pictural tendra lentement à s'estomper.

Le dispositif d’accrochage de mes photographies est extrêmement important à mes yeux. Je suis attachée, bien sûr, à la qualité des tirages analogiques, au rendu minutieux des moindres détails, mais également au choix du format, intime pour les portraits, plus imposant en revanche pour les paysages. D'un mode de présentation extrêmement dense comme au XIXe siècle (Undressed codes à la galerie good friday, 2007) à l'impression sur bâche dans un espace extérieur (Clichés, festival Voies off, Arles, 2011), l'expérience de l'exposition met en valeur les images dans un contexte particulier induisant des choix de présentation spécifiques.


Cet héritage de la peinture, imprégnant toutes mes recherches, accompagne quotidiennement mon regard et par là, le détermine dans son rapport au monde. Poser un regard revient à transposer le visible dans le pictural.

Louise Bossut, 2008